jmm on Fri, 17 Dec 1999 17:43:39 +0100 (CET)


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[nettime-fr] Costes - suite (excuser le cross-posting)


pressé de faire tourner, j'ai omis de resituer le contexte, désolé :

Costes est loin de faire l'unanimité, certains étant écoeurés par ses
provocations (parfois scato), d'autres trouvant dans son art matière à
catharsis, sinon réflexion.

Quoi qu'il en soit, il (sur)vit depuis des années dans les milieux alternatifs
et parallèles, qui accueillent ses concerts/performances (il fait aussi des
CD, des vidéos...), on peut même avancer que c'est l'un des fleurons de
l'underground français (ouf !).

Aux débuts des années 90, en pleine poussée lepéniste, il s'est fendu d'une
chanson (ironique) : "Livrez les blanches aux bicots", de même que plus tard,
il a pu écrire "Partouze à Koweit City", entre autres autres opéras bouffes et
trash fort appréciés d'un certain nombre d'amateurs, "libertaires"
généralement, mais en aucun cas fachos.

Il se trouve qu'il a publié sur son site web les paroles de cette chanson, qui
ont fortement déplu à l'Union des Etudiants Juifs de France, qui s'est décidée
à lui intenter un procès. Au passage, l'UEJF contacta d'autres associations
anti-racistes qui sont elles aussi entrées dans la "danse" (comprenez l'ironie
: ça fait 3 ans que ça dure, et j'ai eu, de la bouche même d'une des avocates
portant plainte, l'aveu qu'elle n'avait même pas été voir le site en question,
faisant "aveuglément" confiance à l'UEJF...).

altern.org étant l'hébergeur originel du site de Costes, il fut lui aussi
amené à la barre, et Costes pris finalement la tangente, et enfonça le clou,
en prenant son propre nom de domaine (je ne vais pas refaire toute l'histoire,
vous pouvez aller sur http://www.costes.org pour avoir plus de détails).

Lors du procès précédent, une dizaine d'universitaires, artistes, blacks,
blancs, beurs & feuj', vinrent à la barre témoigner en faveur de Costes,
parlant de la subversion dans l'art, de ses provocations qui sont tout, sauf
racistes, dénonçant le faux combat que menaient ces associations
anti-racistes, là. La salle, par ailleurs, s'écroulait de rire à chaque fois
que le juge prononçait les paroles "litigieuses" dans cette atmosphère
sentencieuse. Mais cette fois-ci, non.

Cela confinait déjà au harcèlement : frais d'avocat et de procédure, sans
parler de la pression exercée à l'encontre d'un artiste/provocateur qui
n'avait pas forcément besoin de cela (et qu'on ne dise pas que cela lui
faisait de la publicité, ne serait-ce qu'au vu du nombre de papiers censurés
dans la presse, d'"amis" commençant à penser qu'il n'y a pas de fumée sans
feu, et de "hits" sur la page en question : même pas 100...).

Cela fait donc des années que cela dure, les juges successifs n'ayant jamais
voulu trancher "dans le fond", préférant toujours les notions de prescription
et autres débats sur la forme.

Que l'on accepte/comprenne/apprécie ou non le côté surbversif de Costes, son
histoire s'inscrit dans le cadre d'un certain nombre d'attaques pour le moins
insidieuses à l'encontre de la liberté d'expression sur l'internet.

Cette année, la notion de "régulation" de l'internet n'a cessé de s'imposer
aux pouvoirs publics, souvent aidés en cela par les principaux acteurs du web
marchand, souvent en présence d'instances gouvernementales qui n'ont rien de
démocratiques :

Janvier
L'Union Européenne adopte un plan d'action destiné à "promouvoir un usage plus
sain de l'internet, et encourager (son) industrie".

Mars
Sommet de l'Asian Pacific Internet Conference organisé par l'UNESCO et
l'Australian Broadcasting Authority (avec entre autres le Pakistan, la
Malaisie, l'Indonésie, le Japon, l'Inde, la Chine...).

Avril
Création de l'Internet Content Rating Association par le RSCAi et Microsoft,
AOL, Bertelsmann, IBM, Cable & Wireless, British Telecommunications...

Juin
L'Australie adopte une loi confiant la régulation de l'internet à l'Australian
Broadcasting Authority : à partir du 1/1/2000, le web australien est "régulé",
des sites peuvent être fermés, d'autres ("étrangers") "filtrés".

Septembre
L'INCORE et la fondation Bertelsmann organisent l'"Internet Content Summit"
(littéralement : le sommet du contenu sur internet !) et dévoilent leur
"Mémorandum de l'auto-régulation".
Forum des régulateurs de l'Institut international des communications à Kuala
Lumpur (Malaisie).

Novembre
Lionel Jospin lance une "mission de préfiguration" en vue de la
création d'un "organisme de corégulation".
Sommet mondial des régulateurs sur internet organisé par le CSA à l'UNESCO (cf
http://www.article11.net).

Décembre
L'Australie annonce qu'elle autorise ses services secrets à pénétrer les
systèmes et réseaux informatiques "privés", ainsi qu'à en modifier le contenu
(les JO sont en vue...).

Alors que la future loi française sur la société de l'information doit être
débattue en mars 2000, la toute récente affaire opposant l'ex mannequin
Lacoste à Multimania + Cybermédia + SPPI + Esterel
(http://www.juriscom.net/jurisfr/lacoste.htm), nous apprend que les hébergeurs
devraient faire de l'auto-censure, contrairement à ce que l'affaire
altern.org/Estelle Halliday nous avait laissé entendre.

Bref, c'est pas la joie et nombre d'artistes sont déjà, en Australie, victimes
de la censure (pour cause de "pronographie"... cf http://www.autonomous.org).
Bref, "ça arrive près de chez nous"...

Et "nous" sommes un certain nombre à refuser la censure sous toutes ses formes
(voir entre autres les analyses de Noam Chomsky, http://www.zmag.org), en tout
cas le genre de sous-entendus qu'a pu exprimer Françoise Giroud dans le Nouvel
Obs une semaine avant la tenue du Sommet Mondial des Régulateurs de l'Internet
du CSA (qui accueillait entre autres des régulateurs iraniens) : "L'internet
est un danger public puisque ouvert à n'importe qui pour dire n'importe
quoi"...

Costes n'est pas un "sous-entendu" : une victime certainement, mais pas un
"danger" (je tiens à la disposition de qui veut une liste de sites ouvertement
"fachos" & français hébergés, "bien évidemment", chez des providers US).

Bref (Re Re), on ne peut pas laisser passer ça.





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