Antoine Guichardon on Wed, 2 Mar 2005 17:00:19 +0100 (CET) |
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Re: [nettime-fr] PROGRAMMATION COMME ART ... |
Antoine, qu'est ce que tu mets dans tes modeles qui definissent les algorithmes ? est ce purement abstraction mathématique ? est ce que tu les relis à d'autres lois, physiques, comportementales, organiques ou que sais je ? Antoine Schmitt wrote: > Bon, alors quelques précisions sur mon point de vue (je crois qu'il va > falloir que j'écrive un de ces jours un vademecum de l'art programmé). > > :::::::::15/02/05::::13:55 +0100::::listo::::::::: > >> "d'un art de la programmation", ou encore "de la programmation comme >> art", > > > Tordons le cou une fois pour toutes à cet "art de la programmation" > qui fait partie des lieux communs qui refont surface tout le temps : > l'art de la programmation qui n'a pas plus d'intérêt que l'art de > poser de belles canalisations, ce qui est déjà pas mal, très utile et > important dans le monde industriel, et demande un certain génie, mais > n'a aucun intérêt pour et n'a rien à voir avec l'art programmé. > Les langages de programmation sont de magnifiques créations de > l'esprit, denses et magiques, outils merveilleux, joyaux du savoir, de > la connaissance et de l'intelligence humaine. Mais ils n'ont rien à > voir avec l'art programmé. > L'usage, et le détournement, des nouvelles technologies internet, > wifi, téléphonie mobile, etc... relèvent plus de l'art social - actuel > et souvent très juste - , que de l'art programmé. > > L'art programmé a fondamentalement à voir avec un programme ___en > fonctionnement___ : > > :::::::::15/02/05::::17:41 +0100::::Yann Le Guennec::::::::: > >> Le programme est activé par son environnement. Le programme n'agit >> pas en tant que tel. Le programme est un plan, un diagramme, un >> modèle, un dessin, un champ de possibles. > > > Soyons précis et ne jouons pas sur les mots : en effet, un programme > est d'abord un bout de texte passif et amorphe, uniquement > compréhensible par des programmeurs, et dont le seul intérêt est de > l'ordre de l'ingéniérie. Mais une fois exécuté, une fois la touche > "start" appuyée, tout change: le programme en fonctionnement agit > bien, seul ou en fonction de son environnement - qui peut inclure le > spectateur, il agit sur son environnement, sur lui-même, dans le réel. > L'art programmé est l'art des programmes en fonctionnement, qui > agissent sur le monde. > > (Il existe bien une branche anecdotique, dite "code art", qui traite > du programme comme texte passif, qui le montre car il a une forme, ou > éventuellement le compare à son effet - voir forkbomb.pl qui a gagné > transmediale.02, etc... mais c'est une sous-branche). > > :::::::::15/02/05::::13:55 +0100::::listo::::::::: > >> C'est faux de croire que le code est fait pour la machine, que le >> code ne "sert" qu'a ça, le code est d'abord conçu par et pour le >> programmeur et pour toutes les personnes interessées > > > Mon chez Loz, je ne suis pas d'accord du tout : d'abord, le code comme > texte ne peut être jugé que s'il est montré, c'est à dire s'il est lu > par le spectateur. Et en supposant que l'artiste décide de montrer le > code, quels sont les critères applicables pour l'apprécier ? Tous les > critères de l'industrie (réutilisabilité, lisibilité, maintenabilité, > évolutivité, modularité, virtuosité, pour citer les plus habituels) > n'ont qu'un intérêt très réduit pour le commun des mortels (un peu > comme la formule chimique de la peinture pour le fan de Bacon), et > pour ceux qui peuvent lire ce code et apprécier la virtuosité ou > l'ingéniérie mise en oeuvre, il faut savoir que cela n'a _aucun_ > rapport avec le résultat, l'effet perceptible du programme, c'est à > dire ce qu'il fait quand il est exécuté. Et s'il est apprécié pour > autre chose que pour des valeurs d'ingénieur, alors pour moi c'est de > l'obscurantisme, ou de la fascination pour l'inconnu, c'est comme > trouver jolie une équation mathématique qu'on ne comprend pas. Ou > alors c'est comme les peintres qui se montrent leur pigments les uns > aux autres. Non, pour moi, la fétichisation du programme-texte-passif > de la part des artistes est un leurre fatal. > > :::::::::15/02/05::::17:41 +0100::::Yann Le Guennec::::::::: > >>> Pour les pommes de terre, j'ai du mal à penser qu'elles sont >>> "actives", qu'elles agissent d'elles-même. Elles sont plutôt agies >>> par leur chimie, leur nature. >> >> >> La nature du fruit (et du légume, pas seulement les pommes de terre) >> est le fruit lui-même, il est vivant et actif dans son environnement, > > > Pour ce qui est des pommes de terres qui pourrissent, est-ce que nous > ne serions pas dans un ready-made d'art programmé biotechnologique ? > Ce qui tire un peu les choses par les cheveux je trouve... > > :::::::::15/02/05::::17:41 +0100::::Yann Le Guennec::::::::: > >>> Je pencherais plutôt pour de l'art cinétique : une fois lancé, on >>> sait tous comment ça va finir. Le plaisir est dans le temps qui >>> s'écoule, dans le chemin. Dans l'art programmé, le futur reste ouvert. >> >> >> Ni plus ni moins. Le champ des possibles ouvert par un algorithme >> implémenté dans une machine électronique ou non, n'est pas plus vaste >> que celui ouvert par des objets vivants placés dans un espace, en >> tout cas rien jusqu'ici ne permet de l'affirmer. > > > D'accord. Je parlais des pommes de terre, pour lesquelles le futur, > une fois placées sur une table, manque un peu de surprises. Pour ce > qui est du vivant, ou pour être plus précis, de l'animé, en effet, > celui-ci comme matériau a peu à envier au programmé. Sauf... sauf que > l'art programmé s'articule sur un langage (et non pas un langage de > programmation, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, voir > ci-dessus), et ce langage est l'algorithme. Rappel: l'ordinateur a été > conçu (par Alan Turing dans les années 1940) comme une machine > universelle : une machine qui peut simuler le fonctionnement de > _n'importe quelle autre_ machine à partir du moment où on peut la lui > décrire. Voilà ce qu'est la programmation : le moyen de décrire et de > faire fonctionner une machine _quelconque_, à partir du moment où vous > pouvez la décrire, et même si non, ou approximativement : il en > sortira toujours quelque chose, et parfois d'intéressant. C'est donc > un matériau, et même un méta-matériau : un langage. C'est donc bien un > réel matériau pour le plasticien, pas comme les corps des performers, > qui ne seront jamais que détournés de leur libre-arbitre-incarné > originel. Et là j'ai fait le tour de mon argumentaire sur ce point, si > vous voulez bien continuer la dialectique pour me relancer, ou bien, > pour mes amis de transitoire observable, prendre le relais, ou non ... > < n e t t i m e - f r > Liste francophone de politique, art et culture liés au Net Annonces et filtrage collectif de textes. <> Informations sur la liste : http://nettime.samizdat.net <> Archive complèves de la listes : http://amsterdam.nettime.org <> Votre abonnement : http://listes.samizdat.net/wws/info/nettime-fr <> Contact humain : nettime-fr-owner@samizdat.net