/b/u/g/ on Fri, 3 Dec 1999 09:17:57 +0100 (CET) |
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[nettime-fr] La machine de guerre du cine-oeil |
m u l t i t u d e s o n l i n e .................................... LA MACHINE DE GUERRE DU CINÉ-OEIL ET LE MOUVEMENT DES KINOKS LANCÉS CONTRE LE SPECTACLE Par Maurizio Lazzarato 1. A l'intérieur du processus revolutionnaire russe le mouvement de Kinoks, sous l'impulsion de Dziga Vertov, nous offre la possibilité de voir fonctionner une "machine de guerre" lancée contre la machine capitaliste de production de l'image et de la représentation. La conceptualisation vertovienne et la pratique des Kinoks anticipe, en la deplacant completement, la critique du "spectacle" comme elle a été conçue à la fin des années '60 et se présente, sous beaucoup d'aspects, comme actuelle. Comme Vertov a essayè de demontrer, pour resister au spectacle, il faut atteindre la "machine" qui le produit. La critique du "spectacle" ne peut pas être pensée seulement, comme le font les situationistes, en tant que "éloignement du réel dans la representation" ou comme renversement du monde dans l'image. En effet la reconnaissance de l'"aliénation du directement vecu" dans l'image et la représentation t, ne nous fait pas sortir du monde de la représentation et de l'image. Paradoxalement même dans le domaine des tecnologies cinématografiques (mais aussi vidéo et numériques) vaut le programme foucauldien de génealogie des techniques disciplinaires "Ni scéne, ni spectacle, ni représentation, mais machine". Et cette machine est à la fois esthétique, sémiotique, technologique et sociale. Lancer une "offensive contre le monde visible" organisée par le capitalisme requiert impérativement l'intégration des ces differents agencements. Pendant tout le restant du siècle la complexité et la radicalité (dans le sens d'aller aux racines des choses) de cette position sera dilué en critique esthétique, politique ou sociale la plus part du temps opposés et incompatibles. Même le gruope godardien "Dziga Vertov" qui se refesait explicitement à cette expérience ne sera qu'une très pale et timide allusion à la complexité de la "vision" vertovienne.. 2. La revolution soviétique n'est pas interpreté par Vertov seulement comme effondrement du pouvoir et des institutions capitalistes en Russie, mais aussi comme effondrement de l'"homme" et "son monde". Le cinéma est immediatement compris comme expression machinique des forces qui, se composant des façon differentes avec les forces "dans l'homme" (force de voir, de sentir, de percevoir, de penser), ouvrent à des nouvelles formes de subjectivations. Ces "forces du dehors" que le capitalisme fait surgir en premier plan, sont d'abord les forces du temps et du virtuel qui trouvent dans des machines ("machines à cristalliser le temps") des puissants moyens d'expression. La caméra libère la perception et la pensée du centre du gravité qui les encraient au corps humain. Le "ciné-oeil" (que Vertov appelle aussi "machine-oeil") se meut à l'intérieur d'une métamorphose perpetuelle, un mouvements interrompu des corps en nous rendant sensible une nouvelle matière, des nouveuax affects et des nouvelles forces. Ainsi, dans l'intensité des premières images cinématographiques le "monde" semble ebranlé et perdre sa solidité et sa stabilité. Du devenir des corps le cine-oeil capte leur intensité, leur élément incorporel, en introduisant non seulement le mouvement dans l'image, mais aussi le temps. Les mouvements aberrants de la caméra et du montage nous introduisent à une expérience directe du temps, des durées et des vitesses qui ne sont plus eulements humaines. En saisissant dans le dévenir des corps la virtualité d'un monde deterritorialisé, le cinema fait allusion à un nouveau corps et à une nouvelle pensée. Avec le cinéma on est dévenu des mutants de la perception , de la vision et de la pensée, de la même façon que dans les unises l'homme s'est hybridé irreversiblement avec les machines mécaniques et thermodynamiques. L'"homme" découvre avec horreur ou avec joie qu'il ne pense pas avec la conscience, mais à travers de machines: machines à voir et machines à penser. Au début de l'aventure cinématographique la "pensée visuelle" renouvelle la tentative de Leibniz et de Spinoza de saisir l"automate incorporel" qui enchaine les images en déçà et au delà de la conscience. Le mouvement de Kinoks designe celà comme le terrain de lutte de classe. 3. Le capitalisme fait surgir un nouveau "visible" dont le sujet ("Je vois") n'est pas le sujet psychologique et dont la forme sociale ne peut pas être reduite au public. Ce dernier annonce un sujet collectif et multiple qui ne peut pas être appréhendé seulement par "le client assidu" des salles obscures. Le nouveau prolétariat en constitution chez Vertov, n'est pas seulement une reférence idéologique, mais tout d'abord un paradigme esthétique et productif d'agencement : l'usine à la place du théatre, le cybor de l'ouvrier collectif, agencement de l'homme et la machine, à la place de la représentation subjective. Le déchiffrement du visible ne peut pas donc être opéré par des technologies litteraires, dramaturgiques ou graphiques, mais seulement par une machine : la machine cinématographique. Le "je vois" du ciné-oeil est un processus de singularisation du corps collectif du proletariat qui agence à la fois les forces dans l'homme, dispositifs technologiques, flux temporels et agencement sociaux. Pour vivre cette mutation du point de vue de classe selon Vertov la première nécessité est celle de ne pas renfermer le cinéma sur lui même et de saisir la spécificité "temporelle" de ces nouvelles machines et leur agencements immédiatement social. En effet le cinéaste, le producteur et le public collaborent plus au moins consciement à la reproduction de leur propres rôles, en enrichessant, chacun selon leur spécificité, les focntions d'assujettissement et d'asservissement de la machine de production capitaliste de l'image et de la représentation. De la même façon, le caractére de masse de la comunication cinématographique est une condition formelle de la communication cinématographique même, qui doit être intégré en tant que telle dans la production de film. 4. Renfermer le cinéma sur lui-même est ce que Vertov dénonce comme une opération de prises de pouvoir de sa forme commerciale et sa forme artistique sur d'autres formes de production possibles. "Le cinéma actuel, conçu comme une activité commerciale, de même que le cinéma conçu comme un secteur de l'art, n'a rien de commun avec le travail qui est le nôtre." Il ne s'agit pas de produire de contenus différents (artistiques, politiques, sociales) à l'intérieur de la structure cinématographique, mais de détruire le cinéma en tant que machine capitaliste de production du visible, de la perception et de la pensée, sur son propre terrain. "Vive la vue de classe" ne se refère pas à un "autre vision" du monde (plus ethique, plus politique, plus esthétique), mais tout d'abord à un autre agencement corporel , technologique et d'énonciation. Seulement à cette condition toutes les fonctions "cinématographiques" pourront être réagancer ( mais en changeant ainsi de nature). Vertov perçoit très profondement que les processus machiniques et sociaux de création, les virtualités de nouvelles formes de perception et de nouvelles formes de pensée que la lutte de classe a suscité dans le monde sont constamment rabattues sur le rapport "spectateur-réalisateur". Le ciné-drame (avec ses acteurs, ses scénarios, ses studios, ses metteurs en scène) est la forme sous laquelle la "représentation" s'empare des nouveaux moyens d'expressions et reduit le corps collectif que la révolution mondiale a fait émerger en public. Vertov ne sait pas ce que peut cette nouvelle corporalité et ce que peuvent les formes d'expression collectives de ce sujet mutant et en constitution du prolétariat industriel. Mais il sait que la "ciné-sensibilité" est un enjeu politique majeur. 5. Toute la polémique de Vertov contre Hollywood ( et aussi, avec des nuances la polémique avec Ensenstein) est organisée autour de la nécessité pour la revolution de soustraire le cinéma aux images et à la représentation. Vertov veux faire exploser l'agencement technologique et la division du travail du"cinèma" car ils rabattent les forces du temps et leur composition avec les forces dans l'homme sur la représentation et l'image. Le cinéma risque, avec ses prises de vue statiques et ses rythmes standardisés, de flatter notre oeil qui "voit très mal et très peu", au lieu de d'explorer, indépendamment de la position de notre corps pendant l'observation, le cahos des phénomènes visuels qui remplissent l'espace, ("Je suis le cine-oeil. Je suis l'oeil mécanique. Moi, machine, je vous montre le monde comme seule je peux le voir. Je me libère et pour toujours de l'immobilité humaine, je suis dans le mouvement interrompu.....Libéré de l'impératif des 16-17 images par seconde, libéré des cadres du temps et de l'espace, je juxtapose tous les points de l'univers où que je les aie fixés...). Le programme de Kinonks est au contraire de développer les "accidents" de tournage - prise de vue rapides, la microprise de vue, la prise de vue mobile, la prise de vue avec les angles de vue les plus innatendus etc. - dans un système de "abberations apparentes" qui nous pousse vers la perception du temps ("Le cine-oeil se définit comme comme le microscope et le téléscope du temps..."). Le ciné-oeil méne à une perception neuve du monde, il "déchiffre" d'une manière nouvelle un monde inconnu. A l'intérieur de la division du travil cinématographique, les scénarios fonctionnent comme des dispositifs normatif de la production pour enlever toute la dimension evenementielles à la pratique cinématographique : "la kinopravda ne prescrit pas à la vie de se dérouler conformément au scénario de l'écrivan, mais elle observe et enregistre la vie telle qu'elle est et ne tire que plus tard les conclusions de ses observations". Le scénario insiste Vertov est l'invention d'une seule personne ou d'un groupe de personne et non la rencontre evenementielle avec un monde qui nous est inconnu ("En allant du matériau à l'oeuvre cinématographique (et non de l'oeuvre au matériau) les kinoks s'attequent au dernier - et plus coriace - rempart di cinématographe artistique, le scenario litteraire"). La simulation d'un événement par un realisateur est d'importance secondaire par rapport à l'innactualité du "temps réel" de la vie. Ces deux points de vue différents demandent de qualités et des organisations du travail completement différentes. Si la camèra est l'oeil-machinique qui nous permet d'être dans le mouvement innenterrompu, de se couler dans la variation perpetuelle des corps, le montage ne doit pas ramener ce nouveau visible à la perception humaine et à ses prejugés (la psychologie de l'oeil et son fetichisme linguistique dirait Nietzsche). Le montage vise l'"organisation du monde visible", mais en respectant la dimension temporelle et les forces qui le constituent ( "on a fait bien des tentatives dans cette direction .Et il faut dire qu'on a obtenu certains succes en la matière. Il existe des tableaux des montages qui contiennent des calculs semblables à un système de notation musicale, une étude de rythmes et d'"intervalles" etc;). A salle de projection ("dans l'opium électrique des salles de cinéma le spectateur intoxiqué par la ciné-nicotine tête l'écran qui lui chatouille les nerfs") le mouvement de kinokss prefère les usines, les trains ("Je dirige un ciné-wagon, nous donnons une séance dans une station perdue") et les bateaux. En dévellopant ainsi une suggestion de Kafka il monte de moyen de communication qui nous font voyager dans le temps (de l'image, de la parole) sur des moyens de communication qui nous font voyager dans l'espace . 6. Vertov repete inlassablement que l'objectif du cine-oeil de est voir, faire voir ("Le cine-oeil fait ouvrir les yeux, eclarcit la vue"), car nous ne voyons pas encore. . Le ciné-oeil permet de mettre en relation un mouvement et une image dans un point quelconque de l'univers avec une reaction approprié d'un autre mouvement et d'une autre image dans un autre point quelconque de l'univers. Ces images et ses mouvements sont incommensurables et impercettibles du point de vue de l'oeil humain.("Le ciné-oeil c'est la possibilité de voir les processus de la vie dans tout ordre temporel inaccesible à l'oeil humain, dans toutes vitesse temporelle inaccesibles à l'oeil humain.") Le ciné-oeil doit dénicher dans le chaos du mouvement la "resultante du mouvement propre", qui nous est encore inconnue, il doit produire "parmis toutes les interaction, interattractions, interrepoussages des images, toute cette multitude d'intervalles, la simple equation visuelle, la formule visuelle qui exprime le mieux le sujet essentiel du film.." L'objectif est de se livrer directement à l'étude de phénomènes visuels qui nous entourent. et qui son constituf de la vie ("L'art et la vie quotidienne nous intéressent moins, par exemple, que le thème "La vie quotidienne et son organisation."). Vertov a une conscience aigu que ce que le cinéma annonce est la réorganisation des "processus de production de subjectivités" autour des machines à cristalliser le temps. La realisation de ce projet démande une organisation sociale et technique qui ne peut pas reproduire la division du travail du cinéma. Vertov prevoit une production qui se développe en six séries. Toutes le ciné-oeuvre des Kinoks que l'on peut encore voir ne concernent que la première série ("la vie à l'improviste"). "Dans cette série la caméra entre prudemment dans la vie, après avoir choisi un quelconque point un peu vulnerable, et elle s'oriente dans le milieu visuel où elle aboutit. Dans les séries suivantes, en même temps qu'augmentent le nombre de caméra, l'espace placé sous observation s'élargit. La juxtaposition de différents endroits du globe terrestre et de différents morceaux de vie fait peu à peu decouvrir le monde visible. chaque séries ajoute de la clarté à la compréhension de la réalité. Des millions de travailleurs ayant reconqueri (?) la vue mettent en doute la nécessité de soutenir la structure bourgeois du monde." Le même materiau visuel passe au fur et à mesure à une analyse plus approfondie et à une reorganisation pour mettre en lumière les relations et les rapports des sujets traités en utilisant tous les moyenstechniques et formels du cinéma. Pour Vertov la "fabrique des faits" requierts des "kino-observateurs" qui poroduisent des "ciné-observations" et des "ciné-analyses" dans le cadre d'un cinéma de poésie. Le cinéma a immédiatement abbanodonné ce devenir possible et seulement dans le taravil des video-artsite on peut retrouver une reinvention de cette métodolgie. La "ciné-sensation" est interpreté par Vertov comme une force constitutive. La ciné-liason, lien de classe visuel (ciné-oeil) et auditis entre les proletaires de toutes les nations, est une anticipation des réseaux télévisuel, télématiques te sattelittaires que le pouvoir et les marchés utilisent pour la production et l'aaservissement. "Le ciné-oeil c'est l'espace vaincu, c'est le lien visuel établi entre les gens du monde entier, fondé sur un échange incessant de faits vus, de ciné-documents , qui s'oppose à l'échange de représentation ciné-théatrales." 7. L'originalité de la critique de l'image comme réification du visible tient au fait que pour Vertov l'élément génétique du visible est l'intervalle. Le visible n'est pas fait seulement d'image. Il faut, au contraire, decouvrir ce qui il y a "entre" les images (les intervalles, les rythmes, les mouvement abberants). "L'école du ciné-oeil exige que le film soit bâti sur les "intervalles", c'est-à-dire sur le mouvement entre les images...Les intervalles (passages d'un mouvement à un autre), et nullement les mouvements eux mêmes, constituent les matériaux, les éléments de l'art du mouvement." L'intervalle (saut, coupure, blanc) n'est donc pas ce que le raccord aura pour fonction de suturer, recouvrir, d'effacer, d'apprivoiser pour notre oeil humain ("trop humain"), mais le fond non-imagé, le flux déterritorialisé de déploiement des images. L'intervalle, irreductible à l'image et au mouvement , est au contraire leur source, leur origine et leur la cause. L'interval est ce qui ne se reduit pas au discoursif et au figuratif. On retrouve des accents bergsoniens dans cet effot d'excéder la représentation et les images par les "intervalles": "La matière première de l'art du mouvement n'est nullement le mouvement lui-même, mais les intervalles, les passages, le passages d'un mouvement à l'autre." Le "Ciné-Oeil" est une machine de contraction-détente (cristallisation) du temps. "L'oeil mécanique de la caméra en se laissant attirer ou repousser par les mouvements ouvre le chemin de son propre mouvement ou de sa propre oscillation, et fait des expériences d'étirement du temps, de démembrement du mouvement ou au contraire d'absortion du temps en lui-même...Le ciné-oeil c'est la concentration et la décomposition du temps." Si, comme affirment les situationnistes "toute la vie de nos sociétés s'annonce comme une immense accumulations des spectacle" e si "le spectacle est le capital à un tel dégré d'accumulation qu'il devient images", il faut pousser l'analyse au délà de la marchandise-image. Marx indique dans le rapport entre temps et subjectivité la clef qui nous dévoile l'enigme du travail et de la marchandise comme "cristallisation du temps. Le cinéma et l'analyse de Vertov nous proposent à la reflexion une autre cristallisation du temps. Le cinéma est le premeière machine d'un nuoveau type de machine qui fixé et reproduit le temps de la perception, de la sensibilité et de la pensée. 8. Le cinéma montre montre pratiquement que la pensée deborde la conscience de la même façon que les images debordent la perception. L'homme a perdu la certitude d'être le seul à produire les pensée et les images. Ce qui est en jeu donc est la puissance de penser, l'image de la pensée et de son processus de création à l'époque de l'effondrement de l'"homme" et son monde. La "pensée visuelle" que le cine-oeil realise s'agence à l'"automate incorporel" qui "agitent des cercles d'idées" dans la mémoire et ouvre la possibilité de faire tomber les pensées directement, sans passer par des sémiologies linguistiques, de l'écran dans le cerveau du spectateur. "Il faut que les pensées jaillisent directement de l'écran, sans le truchement des paroles. C'est un contact vivant avec l'écran, une trasmission de cerveau à cerveau...Chacun pénètre dans un cercle d'idées qui s'agitent en germe dans sa propre conscience." Le ciné-langage que Vertov oppose au langage parlé et au langage litteraire fait allusion la complexité des forces et des signes qui agissent pour produire la pensée. "Il s'agit seulement du fait que l'énoncé des Trois chants ne passe pas par le mots mais par d'autres voies, par la ligne d'interaction du son et de l'image, par la resultante de multiples canaux (...tantôt dans le son, tantôt dans l'image, tantôt dans l'intertitre, tantôt par le cadrage interne du mouvement, tantôt par à-coups du sombre au lumineux, du lent au rapide, du nonchalant au vif, tantôt par le bruit...), qu'il passe par des voies souterraines en renvoyant parfois à la surface une dizaine de mots." Cette image de "quelque mots renvoyés à la surface" montre bien que le "ciné-langage" est un instrument puissant de destitution de l'imperialisme des semiologie signifiantes qui imposent le fetischime du sujet et de l'objet au processus de production de la pensée. Les mots écrits et prononcés dans un film ont "un chemin tracé en contre-point" par rapport aux sémiotiques non-signifiantes. C'est une autre image de la pensé que le ciné-oeil fait briller dans l'écran. 10. La perception non-humaine du ciné-oeil renvoit au sur-homme, à l'homme nouveau, qui chez Vertov n'a rien de l'"humanisme communiste". Chez Vertov il n'y a aucun aucune opposition entre l'homme et la machine, car il assume la "deuxième" nature que le capitalisme produit, à la fois comme réalité irreversible et condition de dépassement de l'"homme": "cine-oeil" et "radio-oreille" (aujourd'hui il parlerait surement de "ordinateur-cerveau") sont des hybrides par lequel le sujet collectif de la révolution doit voir, parler, entendre. Corps machinique, cybor de la vision, de la perception et de la pensé qui doit s'exprimer en tant que tel, sans passer par des mediations. A la concentration technologique et financière du cinéma le ciné-oeil repondre avec une "micro-politique" qui implique une socialisation du savoir-faire et une miniaturisation de la technologie. "Nous n'avons pas le moindre besoin d'immenses ateliers, de décors grandiose, non plus que de metteurs en scène "grandioses", de "grands artistes et de femmes photogéniques "sensationnelles". Par contre, il nous faut absolument : 1) des moyens de transport rapides, 2) de la pellicule à haute sensibilité, 3) des petites caméras à main ultra-légères, 4) des appareils d'écliarages tout aussi légers, 5) une équipe de de ciné-reporters ultra-rapide, 6) une armée de kinoks-observateurs. Dans notre organisation , nous distinguons : 1) les kinoks-observateurs, 2) les kinoks-opérateurs, 3) les kioks-constructeurs, 4) les kinoks monteurs (homme et femmes) 5) les kinoks-techniciens de laboratoire. Nous n'insegnons nos procédés de cine-travail qu'aux komsomols et aux pionniers, remettant ainsi notre savoir et notre expérience technique entre les mains sûres de la jeunesse ouvrière montante". Vertov pensait que la caractéristique de "masse" du cinéma ne devait se limiter seulement à la diffusion, mais devait inclure impérativement la "production" aussi, sous peine d'"expropriation" de la puissance d'expression. La critique du "ciné-drame" trouvait son completement dans la critique pratique à la concentration et contrôle des moyens de production par l'industrie du cinéma (de ce point de vue le pouvoir soviétique ne faisait que reporduire l'organisation du travail qu'il voulait critiquer. Au cinéma de gauche et à son "engagement" il opposait une "micropolitique" qui seule pouvait mettre à disposition des travailleurs soviétiques la possibilité de construire la "ciné-liasion" qui était strategique dans les processus de subjectivation collective. La forme collective du cinéma doit s'articuler..."Ce Passage de la création par un seul auteur ou un groupe de personnes à la création de masse conduira aussi, pensons nous à accelerer le naufrage du cinématographe artistique bourgeois et des ses attribus : l'acteur grimacier, la faible-scénario et les jouets couteaux que sont les décors et le grand prête-réalisateur." 11. Vertov a été , peut-être, le seul qui a pensé et organisé le cinéma n'ont pas comme "art des masses", mais comme une activité de masses, une activité constitutive. Vertov ne travaille pas comme un "artiste", mais comme un rélais à l'intérieur d'un réseau de correspondents eparpillés dans toute l'Union soviétique. Il travaille à l'intérieur d'un flux qui le déborde de tout part et qu'il ne peut pas et il ne veut pas contrôler. Cette conception du "travail" met en discussion toute division entre "travail intellectuel" et "travail manuel" et par consequence la figure de l'artiste, de l'auteur et de l'intellectuel ("Le présent film constitue l'assuat que les caméras livrent à la réalité et prepare le théme du travail créateur sur le fond de contradictions de classe et de la vie quotidienne.") Le travail de Kionks ne peut pas être considérré comme travail artistique, mais doit se reconnaître dans la plus vaste production de l'être et du sujet collectif "la cellule des kinonks rouges doit être considérée comme une fabrique parmis d'autres où la matière première fournie par les kinoks observateurs est transformées en ciné-oeuvres à venir" ). La position de Vertov n'a rien à voir, évidemment, avec l'idéologie anti-intellectuele et populiste de l'artiste prolétaire (le prolétaire-réalisateur comme pendant de l'écrivain-prolétaire). Ce qu'il affirme est le fait que le Ciné-Oeil contient des agencements qui ouvrent de territoires inconnus au délà de l'auteur et de l'artiste, de dévénir qui contiennent les virtualités d'autres paradigmes esthétiques, sociaux et productifs 12. La méthode de la machine de guerre consiste dans le fait de pousser encore plus loin la détérritorialisation des flux, l'hybridation homme-machine, la concentration et la decomposition du temps et le développement de la cine-liasons. Et de les reterritorialiser sur un nouveau corps. Si on pousse l'agencement cinématographique à un niveua ultérieur de détérritorialisation et de socialisation on aura la vidéo. L'agencement technologique du cinéma est ,en réalité, utilisé par Vertov comme une anticipation de la vidéo. Dés la naissance de l'expérience revolutionnaire des Kinoks Vertov filme , organise et pense par et avec la "télé-diffusion des images et de sons. "Du point de vue de l'oeil humain, je n'ai effectivement pas des raisons de me montrer à côté de ceux qui, par exemple, se trouvent dans cette salle. Cependant , dans l'espace du cine-oeil, je peux faire un montage de moi non seulement assis à côté de vous, mais mieux, dans différents points de la terre. Il serait ridicule de placer devant le cine-oeil des obstacles tels que murs ou la distance.En prévision de la télévision, il faut comprendre que, dans le montage, cette "vision à distance" est possible. La télévision est selon Vertov non seulement l'agencement technologique plus adéquat à la déterritorialisation des flux, à leur circulation, coupure, montage, mais aussi l'agencement technologique plus adéquat à la dimension sociale et collective de la production de la vie, que le capitalisme a introduit comme son présupposé . "le procédé de radio-transmission des images , inventé à notre époque, pourra nous rapprocher plus encore de notre but essentiel ....Etablir un lien de classe visuel (ciné-oeil) et auditif (radio-oreille) entre les prolétaires de touts les pays, sur la plateforme du déchiffrement communiste du monde." Vertov ne se pose aucun de problème que la cinéphilie du monde entier se pose par rapport à la télévision, car pour lui elle est toute naturellement un développement et une nécessité des formes de coopération productives, perceptives et de créativité du corps collectif et multiple que le capitalisme et la lutte de classe évoquent. Posé dans ce terme ( quand la télévision n'existait pas encore comme dispositif technologique) le problème de la télé-diffusion des images et de sons nous eviterait tous les faux débat entre les alternatives "artistiques" et "culturelles". 13. Les concepts de "Ciné-oeil" et de "Radio-oreille" ne doivent rien à la fascination futuriste pour les machines comme il sont souvent décrits. Mais ils sont au contraire une articulation très precise à la fois des nouvelles conditions de production de subjectivité et et des rapports que cette nouvelle configuration détérmine par rapport à la technologie. La machine sociale prime toujours sur la machine technologique. " Meme dans le domaine de la technique , nous n'avons partiellement à faire avec ce qu'on appelle, le cinéma artistique, car l'exécution des tâches que nous nous sommes posés exige une conception autre de la technique." C'est le montage particulier et spécifique entre agencements sociaux, technologiques, formes esthétiques et réseaux qui impose la nécassit" d'une technologie et non l'inverse. Les mouvements des Kinoks anticipe sur l'agencements technologique qui ne nait de ses articulations comme une nécessité. "Les réalisations pratiques et théoriques des kinonks (à l'opposé du cinématographe joué) ont défini nos possibilités techniques et attendent depuis lontemps la base technique retardataire (par rapport au "ciné-oeil") du cinéma et la télévision sonore." Dans une situation technologiquement arrière comme celle de l'Union Soviétique au milieu des années 20, les Kinoks anticipent sur la télévision . 14. L'impossibilité de monter cette machine de guerre micro-politique dans la révolution et l'ecrasement "hollywoodian" de tout dévenir du cinéma dans le cine-drame (commercial ou artistique) a aboutit très logiquement dans le cinéma de Leni Rifenstheil. Le pouvoir soviétique a préferé avoir ses artistes (Einsenstein) que une machine de guerre, qui presupposé une remise en question radicale de sa conception du pouvoir. L'anticipation formidable que les formes de communication de la révolution portait en soi s'est dévelopée en "spectacle". Si les Situationnistes ont eu le merite d'indiquer la nouvelle forme de la domination, ils n'ont même pas effleuré la machine de guerre qu'il faudrait lui opposer. Même le cinéma dés qu'il a voulu se remettre en discussion (néeorealisme, nouvelle vague) il a du puiseer à sa manière dans cette vitaulité du ciné-oeil. 15. L'expérience extraordinaire de mouvement de Kinok a été la seule à agencer des machines à cristalliser le temps à l'intérieur d'un processus de constitution d'un corps révolutionnaire au délà de la propoagande et de la représentation artistique. Bloquée déjà son démarrage cette expérience ne nous dit pas encore qu'est-ce que peut ce nouveau corps . Mais, aujourd'hui que des nouveaux dispositifs technologiques, que des nouvelles machines à cristalliser le temps , reprosent l'actualité d'un "corps supérieur", cette expérience peut toujours nous rappeller ce à quoi il faut resister: - au rabattement de la variation universelles, des flux déterritorialisés, de la matière-temps sur l'image et la représentation. - au rabattement des nouveaux processus de production de subjectivité sur le spectateur ( artistique ou commerciale a peu d'importance) - au rabattement de l'agencement constitutif du corps collectif en instrument industriel ou en agencement esthétique. - au rabattement des nouvelles formes de coopération et des nouvellles formes de savoir sur l'auteur et l'artiste. [ Ce texte a été publié dans la revue "Persistance" ] . . . . / b / u / g / bug@samizdat.net l o s t i n c y b e r s p a c e . . . _______________________________________________ #<nettime-fr@ada.eu.org> est une liste francophone de politique, art, culture et net, annonces et filtrage collectif de textes. #Cette liste est moderee, pas d'utilisation commerciale sans permission. #Archive: http://www.nettime.org contact: nettime@bbs.thing.net #Pour vous desabonner de cette liste, suivez les instructions sur http://ada.eu.org/cgi-bin/mailman/listinfo/nettime-fr #contact humain : nettime-fr-admin@ada.eu.org